Fédération québécoise des massothérapeutes (FQM)

Puis-je masser un survivant de la COVID-19 ?

Dossiers, Recherche scientifique, Lectures

Malgré les mesures sanitaires en place qui visent à limiter la propagation de la COVID-19, force est de constater que la pandémie progresse partout dans le monde. En tant que massothérapeute, vous êtes donc susceptible de recevoir des clients qui ont contracté la COVID-19 dans le passé. Pouvez-vous masser ces survivants en toute sécurité ?

 

Pour répondre à cette question, il faut d’abord connaître les effets du coronavirus sur le corps.

 

La COVID-19 et les thromboses

On reconnaît aujourd’hui que la COVID-19 augmente les risques de désordres de la coagulation (p. ex. thromboses veineuses, embolies pulmonaires) chez les personnes atteintes. Ce risque serait plus élevé lorsque la maladie est sévère et entraîne une hospitalisation [1].

Le mécanisme d’apparition des thromboses lors d’une infection à la COVID-19 est désormais mieux compris : le virus attaquerait les cellules qui tapissent les vaisseaux sanguins, ce qui affecterait leur intégrité et favoriserait la formation de caillots.

La particularité avec la COVID-19 est que les caillots peuvent se présenter dans n’importe quel vaisseau sanguin, du plus petit capillaire jusqu’à l’artère, et ce, dans n’importe quel organe. Dans les cas les plus sévères, ils peuvent provoquer une embolie pulmonaire ou un accident vasculaire cérébral.

Il est à noter que les personnes qui ont souffert d’une thrombose associée à la COVID-19 sont susceptibles d’avoir reçu un traitement d’anticoagulants [2]. La durée de l’anticoagulothérapie varie en fonction de la condition du patient et la présence de facteurs de risque de thrombose. Il est donc possible que le client ayant contracté la COVID-19 reçoive toujours des anticoagulants lors de son rendez-vous en massothérapie.

 

Le mystère de la COVID longue 

De manière générale, la plupart des personnes qui contractent la COVID-19 se rétablissent complètement dans les quelques semaines suivant l’infection. Mais pas tous.

Dans environ 10 à 15 % des cas, les individus qui ont reçu un diagnostic de COVID-19 auront des symptômes persistants même 12 semaines (3 mois) après leur infection [3]. C’est ce que l’on appelle la COVID longue. Encore aujourd’hui, la condition s’avère un mystère pour la communauté médicale.

Voici quelques-unes des manifestations de la COVID longue :

  • Fatigue
  • Essoufflement
  • Problèmes de concentration et de mémoire (brouillard cérébral)
  • Maux de tête
  • Acouphènes
  • Toux

 

altitude

 

Adapter un soin de massothérapie chez un survivant de la COVID-19

On en sait encore très peu sur l’efficacité et la sécurité du massage chez les patients ayant contracté la COVID-19. Quelques recherches sont en cours, par exemple pour évaluer l’efficacité de la massothérapie sur la qualité de vie des personnes qui récupèrent de la COVID-19 et voir les bienfaits du Tui Na dans la gestion de la diarrhée associée à l’infection par le SARS-CoV-2. Toutefois, les résultats de ces études n’ont pas été publiés.

En l’absence de données probantes permettant de confirmer l’efficacité et la sécurité du massage chez les survivants de la COVID-19, la prudence s’impose.

Nous vous proposons ici quelques pistes de solutions pour vous aider à adapter vos soins de massothérapie auprès de cette nouvelle clientèle.

 

  1. Approfondir le questionnaire santé pour les clients qui ont eu la COVID-19

Pour déterminer si un massage est sécuritaire chez le survivant de la COVID-19, pensez à l’interroger sur son risque de thrombose et sur les éventuels symptômes de la COVID-19 qui persistent depuis l’infection.

Voici quelques exemples de questions à ajouter à votre questionnaire santé si votre client a reçu dans le passé un diagnostic de COVID-19 :

  • Avez-vous été hospitalisé en raison de la COVID-19 ? Cela vous informera sur la sévérité de la maladie chez votre client.
  • Vous a-t-on prescrit un anticoagulant pour réduire le risque de caillots sanguins associés à la COVID-19 ? Si oui, prenez-vous toujours cet anticoagulant ? Le soin devra être adapté si la personne est sous traitement d’anticoagulothérapie.
  • Avez-vous remarqué des marques sur votre corps (p. ex. pétéchies, ecchymoses) ? Il pourrait s’agir de signes d’un trouble de la coagulation, lié ou non à la COVID-19. Dans ce cas, une évaluation médicale pourrait s’avérer nécessaire.
  • Êtes-vous en mesure de faire de l’activité physique sans problème, c’est-à-dire sans être essoufflé de manière inhabituelle ? Cela pourrait indiquer une possible atteinte cardiorespiratoire exigeant une évaluation médicale.
  • Avez-vous des séquelles de la COVID-19 ? La nature de ces séquelles vous permettra d’ajuster votre soin en fonction de l’état de santé de votre client.

 

  1. Adapter le massage à un état post-COVID-19

Selon les informations que vous récolterez lors du questionnaire santé, vous serez en mesure de déterminer s’il est sécuritaire de poursuivre avec un massage pour ce client ou s’il est préférable de le diriger vers un médecin pour une évaluation.

Dans le cas où le massage est considéré comme sécuritaire, des adaptations pourraient tout de même s’avérer nécessaires afin d’éviter les complications cardiovasculaires (p. ex. thromboses) :

  • Privilégiez les techniques et les manœuvres douces à celles qui sont plus profondes (évitez par exemple les pétrissages vigoureux, les techniques de drainage profond, le massage des tissus profonds).
  • Ajustez la pression appliquée sur le corps du client afin d’éviter les saignements et les ecchymoses, surtout si le patient est sous anticoagulothérapie.

Des modifications au soin pourraient aussi être indiquées en fonction des séquelles de la COVID-19 présentes chez la personne.

Et rappelez-vous : dans le doute, n’hésitez pas à diriger votre client vers son médecin !

 

Références

[1] Institut national d’excellence en santé et en services sociaux — INESSS. (23 juin 2020). COVID-19 et risques thrombotiques [PDF]. Repéré à https://www.inesss.qc.ca/fileadmin/doc/INESSS/COVID-19/COVID-19_INESSS_Risques_Thrombothiques.pdf 

[2] Institut national d’excellence en santé et en services sociaux — INESSS. (12 mai 2020). COVID-19 : manifestations cutanées (lésions de type perniose, lésions associées à des dommages vasculaires et autres types de lésions). Repéré à https://www.inesss.qc.ca/fileadmin/doc/INESSS/COVID-19/COVID-19_INESSS_Manifestations_cutanees.pdf

[3] Gouvernement du Québec — CISSS de la Montérégie Ouest. Qu’est-ce que la COVID longue ? Repéré à https://santemonteregie.qc.ca/ouest/quest-ce-que-la-covid-longue